State of Violent Disorder

Julian Burgos - Solo show
Exposition
Arts plastiques
Boon Paris 04

Venus, 2013 - Huile sur toile, 162 x 130 cm
Julian Burgos

L’œuvre de Julian Burgos pourrait se définir comme une peinture défigurative, jouant librement avec les normes de la représentation réaliste. A la croisée d’esthétiques aussi diverses que la peinture d’histoire, le portrait, classique, l’iconographie porno, la photographie documentaire ou le cartoon, elle reflète la diversité de ses influences nomades et la volonté appuyée de ne pas s’enfermer dans un genre. L’exposition « State of violent Disorder » cherche ainsi à rendre compte des formes plastiques et des intentions qui persistent à même cette prolifération stylistique. Le désordre dont il est question renvoie ici à une désorganisation des schèmes perceptifs, une décomposition des formes reconnaissables qui entache la représentation et obstrue le regard spectateur, en vue de mieux susciter le désir de voir. La violence se réfère quant à elle aux gestes du peintre, coups de pinceaux expressionnistes ou aplats irréguliers, par lesquels il recouvre les visages et dégrade les corps. En faisant valoir la vivacité de son exécution, entre finesse et brutalité, Julian Burgos cherche à déconstruire et à déterritorialiser les images pour contrarier leurs normes de lecture. 

La dernière série en date associe l’univers du tennis de compétition à celui de la chasse, appuyant le parallélisme entre trophées sportifs et animaliers. Au-delà de la référence à une culture aristocratique de la chasse à court réinvestie dans les tournois du Grand Chelem, ces compositions sont surtout marquées par un débordement d’énergie, commune à l’instinct du champion et à l’intuition du peintre. Ces figures de joueurs, hybridées avec des boucs, des cerfs ou des loups, démontrent dans cette posture une puissance physique et une concentration mentale qui rompent avec l’apathie affichée du public, foule anonyme et impersonnelle qui détourne son regard de la scène principale. Confrontant la bestialité à l’humanité, ces toiles installent l’esthétique diffuse d’un onirisme païen où les règles de l’animalité se substitue aux lois de la civilisation, à l’instar de cette dame à la fourrure, au visage effacé, qui rivalise d’élégance avec un loup posé en miroir, aux expressions étrangement anthropomorphiques.

Les portraits inspirés de la peinture d’histoire ou de l’académisme classique permettent autant à Julian Burgos de rendre hommage aux toiles de maîtres que de détourner la tradition du portrait en l’arrachant à sa fonction mimétique. Défigurés, aux traits dissous, ces personnages aux accents baconiens sont les exemples frappants du travail de déconstruction de l’identité entrepris par Julian Burgos. Ici mis en résonance avec les tableaux pornographiques, ils s’ouvrent à de nouveaux réseaux de sens qui en renforcent la dimension subversive. Si d’un côté, l’effacement des traits de ces personnages officiels les ramène à la condition d’individus lambda, impossibles à identifier, le réalisme des pin-up et le détail de leur jouissance sort tout au contraire ces modèles de leur anonymat, à contrepoint de leur fonction utilitaire et consommatoire. De même, confronté à la charge érotique de cette chair désinhibée, Napoléon est associé aux faiblesses de sa vie sexuelle, voire à son impuissance, la mission édificatrice de la peinture étant ici clairement contrebalancée par une volonté de contrarier la représentation du pouvoir.

A force d’effacement, les formes sont parfois réduites à n’être plus que les ombres d’elles-mêmes, installant une esthétique spectrale, développée notamment à travers le mur de petits formats (des visages et des voitures absorbés dans leurs mouvements), et par ailleurs rappelé à travers les vanités en céramiques ou les masques froissés dans leurs cloches. A travers ces gueules cassées et fantomatiques, Julian Burgos insuffle le mouvement d’un délitement de la figure saisie dans le mouvement de sa désagrégation. Parmi les pièces les plus colorées, les compositions de groupe font ainsi état de lignes entremêlées et de motifs enchevêtrés qui liquéfient littéralement la représentation. Placées en regard des rebuts d’ateliers, elles plaident pour un formalisme chiffonné, où les formes absorbent autant leurs lignes de force que les assises structurelles de la composition.

Assumant un style résolument pop, Coyote, le diptyque Piscine et Besides organisent enfin la collision la plus abrupte des imaginaires culturels. Une tête de dessin-animé apposée sur le corps d’une femme en maillot de bain, un aplat de couleur rose se substituant à une plongeuse ou l’image de Blanche-Neige détournée pour promouvoir l’émancipation individuelle dans le couple opèrent tous dans la direction d’un glissement sémantique et d’une décontextualisation humoristique, comme si à la décomposition des figures répondait l’inévitable transformation du sens et la jouissance de sa réinvention.

Florian Gaité, novembre 2015.

Commissaires d'exposition

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Horaires

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Adresse

Boon de Lesdiguières 75004 Paris 04 France
Dernière mise à jour le 2 mars 2020