Stairway to H... Olivier Blanckart, à la Galerie commune

Exposition
Arts plastiques
École supérieure d'art du Nord-Pas de Calais / site Tourcoing Tourcoing

Tel un garnement acharné à démonter les mobylettes, Olivier Blanckart s’acharne à démantibuler les images pour les recomposer à sa façon. Le résultat est mi-expressionniste, mi-bancal, car une rondelle par-ci, un ressort par-là, ont évidemment été égarés au moment du remontage. Toutes ses oeuvres participent d’un principe commun de détournement-retournement.

Complément d'information

Stairway to H... et adresse de l'exposition

Galerie commune, 29-31 rue Leverrier 59200 Tourcoing.
u coeur de la ville, passée la grille métallique, au bout d’une allée verdoyante et étonnamment calme, nous pénétrons dans l’atelier d’Olivier Blanckart. Cohabitent là l’espace du sculpteur et dans un coin un studio photographique. Une sculpture terminée vient d’être photographiée devant un fond uni blanc, elle part chez un collectionneur.
On reconnaît immédiatement, en pied, grandeur humaine, la figure d’Andy Warhol, mais c’est un Warhol bien précis : celui de la photographie de Richard Avedon, celui qui avec un rictus emprunté et tendu soulève son blouson pour nous montrer ses plaies et stigmates, souvenirs de l’attentat de Valérie Solanas. La photographie (dans ses deux variantes) est connue, elle appartient au registre de ce qu’il faut bien appeler le panthéon photographique, le "best of", quelque chose proche de l’esprit Taschen... On retrouvera dans cette catégorie la famille de Walker Evans, le cadavre du Che de Freddy Alborta, le manoeuvre d’August Sander, les grands nus d’Helmut Newton.... Olivier Blanckart "réinterprète" avec des décalages "les icônes populaires ou culturelles" , réinterprète, c’est-à-dire qu’il sculpte, taille humaine, à l’aide des matériaux les plus bas : rouleaux de scotch bruns, cartons, papier kraft... L’aspect pauvre de ces matériaux évoque des familiarités avec d’autres artistes: on pense ici à Martin Kippenberger, ses caisses, ses palettes, à Georg Herold et ses architectures en carton, à Thomas Hirschhorn et ses autels de rue....
A partir d’une de ces images et donc avec ou sur (c’est au choix) le papier et les adhésifs, la mise en volume va leur conférer une étrange réalité ; bien sûr il y a, comme on dit, les détails qui tuent : la filasse du plombier (Olivier Blanckart est titulaire d’un CAP de plomberie depuis 1979) pour les cheveux des grands nus ou la tignasse d’Andy Warhol, le regard du soldat vietnamien qui assiste à l’exécution sommaire, les pieds abîmés de la mère... Mais ce va-et-vient entre une image et sa "sculpture" nous ébranle et nous questionne, ce n’est pas l’hyperréalisme du pauvre mais du riche.
Le lien est cohérent depuis la cabane de Jean-Michel, le SDF du monde de l’art (1992), les Quasi-objets (1993-1996) reconstitution à première vue simpliste et dérisoire en scotch, kraft, carton, d’objets usuels: raquette, tongs, râpe, canettes, fruits, coeurs, bouteilles de scotch (en scotch, eh oui!) jusqu’aux ensembles d’aujourd’hui. Parallèlement et depuis 1990 Olivier Blanckart réinterprète au moyen de la photographie quelques-unes des figures célèbres de l’histoire moderne : "I & other portraits". Tradition de l’artiste qui se grime, se travestit, mais aussi de l’artiste qui convoque l’amitié et fait poser ses ami(e)s. Devant une photo de Marcel Duchamp,Henri-Pierre Roché questionne ce regard : "Amuse-toi, sinon tu nous ennuies" . C’est la série des "Moi en Bruce Willis", "Moi en Guy Debord", "Moi en Philippe Sollers".... mais aussi l’artiste-musicien Xavier Boussiron en Lewis Payne (d’après la célèbre photo d’Alexander Garner 1865), l’écrivain Jean-Yves Jouannais en Rrose Sélavy (d’après la photo de Duchamp par Man Ray 1921)... On nous parle du chanteur Christophe, de David Lynch, de Tom Jones.... "entre un Lagarde et Michard imaginaire, le Quid et un ébréché d’histoire de l’art" .
Enfin il faut parler des "Objets ravalés" d’Olivier Blanckart : la fontaine du square des Batignolles à Paris (1999), la maison de Bienne en Suisse (2000) et cette année le camion Zastava à la Biennale de Cétinié (Montenegro), gigantesque momification en scotch, monument "ressuscité" dans l’espace.

Deux nouveaux groupes sculptés sont prévus pour l’exposition de la Galerie Commune à Tourcoing. La première a pour origine le document insupportable vu et revu sur les écrans de télévision de l’enfant Palestinien Mohamed-Al-Dura vainement protégé dans les bras de son père et atteint par les balles de l’armée israélienne . Olivier Blanckart a conçu un dispositif lié à un procédé narratif, sorte de reprise du thème classique de la colonne sculptée. Ce sera "Stairway to H...", Olivier Blanckart affectionne ces titres qu’il construit à partir de jeux de mots, ellipses à double sens, ou encore de ces fameux réflexes :"ça me dit quelque chose", dans le cas présent ça ne sera pas "Highway to Hell" d’AC DC, mais Led Zeppelin dans les années 70. La deuxième oeuvre : "Katmandoo" nous présente l’image classique du portrait officiel de la famille royale du Népal qui va être massacrée par le Prince héritier en juin 2001, image choisie et largement diffusée dans la presse spécialisée et dont des posters furent, à l’époque, exposés dans les kiosques. "Tel un garnement acharné à démonter les mobylettes, je m’acharne à démantibuler les images pour les recomposer à ma façon. Le résultat est mi-expressionniste, mi-bancal, car une rondelle par-ci, un ressort par là ont évidemment été égarés au moment du remontage."
Nous connaissons Olivier Blanckart qui n’a jamais hésité à s’engager, à appuyer là où ça fait mal, celui qui vient régulièrement nous rappeler des choses pas toujours agréables... Nous connaissons aussi  et pourquoi voulez-vous que ce soit contradictoire ?  Olivier Blanckart dans l’atelier, celui qui, entouré d’oeuvres en cours, autour d’un café, va vous parler des différents types de rouleaux de scotch, de sa découverte de rouleaux de papier kraft blanc, de son dernier outil : le couteau du fourreur...... Il va vous passionner en vous parlant des images photographiques, de leurs différentes versions, de leurs tirages, de leur histoire, de leur impact, de leur statut....

Horaires

du mardi au samedi 12h30-18h30

Adresse

École supérieure d'art du Nord-Pas de Calais / site Tourcoing 36 bis rue des Ursulines 59200 Tourcoing France
Dernière mise à jour le 2 mars 2020