SÉLÉCTION D'ÉTÉ

Pour sa dernière exposition avant l’été 2022, la Galerie Miranda réunit une sélection d’œuvres par 8 artistes contemporains dans le sillon de la première femme photographie, l’anglaise Anna Atkins (1799-1871), botaniste et aquarelliste qui a publié en 1843 le premier livre illustré par les photographies : Photographs of British Algae, cyanotype impressions, publié hors commerce entre 1843 et 1853.  Les algues, présentées comme dans un herbier, sont reproduites sur des photogrammes, images photographiques uniques obtenues en posant le spécimen sur une feuille enduite d’une solution chimique photosensible.  Après exposition au soleil, l’empreinte fixée par lavage à l’eau se détache en blanc sur un fond bleu de Prusse.  Chaque exemplaire du recueil d’Anna Atkins, édité par parties de 1843 à 1853, comporte plus de quatre cents planches, toutes réalisées sur papier sensibilisé à la main. Enfant unique, c’était grâce à son père, le chimiste John George Children, qu’Atkins rencontre William Henry Fox Talbot, botaniste comme elle, et expérimente le procédé aux sels d’argent. Pour son ouvrage, elle adopte l’invention (1842) d’un autre ami, sir John Herschel, le cyanotype (du grec «kyanos» : bleu sombre) qui exploite la sensibilité des sels ferriques à la lumière. En annotant à la main chaque photogramme avec son nom scientifique, Atkins est également la première photographe à apporter du texte à l’image photographique.

Aujourd’hui, les photogrammes en cyanotype d’Anna Atkins se retrouvent notamment dans les collections du New York Public Library, le Royal Society in London, le Linnean Society, le J. Paul Getty Museum, le Rijksmuseum et le Jardin des Plantes à Paris.  En 2018, le New York Public Library a monté une excellente exposition intitulée “Anna Atkins Refracted:  Contemporary Works”, présentée ainsi:

En 1843 Anna Atkins a commence la réalisation de “Photographs of British Algae: Cyanotype Impressions”, le premier livre photographique.  Aujourd’hui, plus que 175 ans plus tard, son projet historique – révolutionnaire par la convergence de science et art, par sa modernité, et par sa réalisation par une femme scientifique à un époque dominé par les exploits des hommes – reste emblématique our artistes et amateurs de la photographie. Cette exposition réunit des oeuvres de 19 artistes dont la pratique témoignent à la grande influence et heritage d’Anna Atkins”.

Un beau catalogue a été édité par la NYPL mais il est aujourd’hui épuisé :  malgré la révolution technique, scientifique et artistique que représente son travail, à ce jour on retrouve peu d’ouvrages compréhensifs dédiés à la vie et au travail d’Anna Atkins, hormis un petit coffret de papeterie, vendu 20 Euros.  

Dans le meme esprit que cette exposition new yorkaise, à une plus modeste échelle, la Séléction d’Été à la Galerie Miranda rend hommage à cette grande pionnière de la photographie avec des œuvres figuratives et abstraites réalisées par des artistes majeurs qui ont chacun forgé une signature unique dans le champ de la photographie expérimentale.  Pour certains de ces artistes, le procédé technique sert le ‘sens’ de leur travail ; pour d’autres le procédé est le sens du leur travail.  En expérimentant des tirages à la gomme bichromatée, des tirages au sang, en cyanotype, des luminogrammes, des photogrammes, des chimigrammes, des tirages manipulés ou peints à la main, ces artistes continuent à ouvrir les possibilités de la photographie d’aujourd’hui, tout en puisant dans l’héritage d’Atkins.