RENCONTRE : BASELITZ AUX GOBELINS
Marie-Hélène Massé-Bersani
Directrice du département de la production des manufactures au Mobilier national
Les manufactures de tapisserie et de tapis des Gobelins, de Beauvais et de la Savonnerie sont des lieux de production actifs qui perpétuent, depuis leur création au XVIIe siècle et sous l’impulsion du mécénat de l’Etat français, un savoir-faire quatre fois séculaire mais toujours tourné vers la modernité.
Les manufactures ont continuellement épousé l’art de leur temps, témoignant ainsi des préoccupations esthétiques de chaque époque et de leur rôle original sur la scène artistique. Hier, les chefs-d’œuvre tissés de Le Brun, Poussin, Boucher, leur ont conféré d’emblée un prestige international. Aujourd’hui, ce sont Maria-Elena Vieira Da Silva, Louise Bourgeois, Yves Oppenheim, Erik Boulatov, Gérard Garouste, Shirley Jaffe, Bernard Piffaretti, Gottfried Honegger.
Le Mobilier national, administration à laquelle sont rattachées les manufactures depuis 1937, poursuit ce qui a été la politique de l’institution depuis sa création : la mise en œuvre d’une collaboration avec les artistes contemporains. L’usage des manufactures nationales repose sur l’instauration d’un fructueux dialogue entre le licier et l’auteur du modèle. Le licier n’est ni le créateur initial ni un simple exécutant. Il est un interprète au sens le plus noble du terme, participant à une co-création originale. L’œuvre tissée n’est pas une copie, mais une création à part entière où s’actualise et se déploie le potentiel contenu dans chaque modèle. Une nouvelle matière, de nouvelles dimensions, le travail des teinturiers et le talent des liciers concourent à lui conférer une véritable originalité et une expressivité particulière.
Chaque projet est étudié comme une pièce unique. Pendant la préparation, le concepteur et son interprète vont travailler ensemble à la mise au point a n que l’artisan puisse enrichir le modèle de son savoir-faire tout en traduisant l’image que le créateur a conçu. M.H.M.B
Georg Baselitz
Projet de tapis Les Oiseaux
L’analyse du dessin aquarellé a donné l’idée de réaliser un tapis de 3m50 sur 2m70. La composition s’adapte au champ décoratif d’un tapis comme à la réversibilité de la gure renversée. Il n’y a pas de sens de lecture dans un tapis, ni entrée ni sortie. L’interprétation de l’essai présenté a été validé par Georg Baselitz lui-même lors de sa venue à l’atelier en avril dernier. Il a sélectionné les trois couleurs principales autour desquelles les gammes de mélange seront établies - l’écru légèrement teinté de vert du fond ; le vert moyen ; le gris anthracite le plus foncé du graphisme - M.H.M.B