PAYSAGES CHAVIRES - 2

Dès le premier contact chacun s’est posé la question : comment exister en regard de cette montagne, qui intimide et fascine, ce paysage sidérant, puissant et toujours renouvelé ? Passé le moment du face à face, les artistes ont accepté d’y répondre avec des points de vue et des pratiques différentes. La photographie, le dessin, la sculpture ou l’installation rendent compte de cette confrontation, passant du regard attentif à la cohabitation décalée. Anne Lise Broyer et Didier Petit transcrivent leur observation aigue du lieu avec des portraits aiguisés de la montagne. Anne Lise Broyer travaille sur la lumière qui contraste tout au long du jour les couleurs de la roche. Avec des photographies et des dessins, elle écrit et décrit le paysage dans le détail des pierres et des végétaux. Didier Petit explore les liens entre les motifs récurrents du relief et le corps découpé. Il utilise l’image radiographique, comme une coupe géologique, une sorte de traversée intérieure de l’organisme et du paysage. Il incise au cutter les pleins et les vides du dessin qu’il offre en panorama dans la cour du domaine. Mais que faire devant l’évidence de la montagne ? Le domaine viticole existe dans sa réalité agricole et paysagère. Les rangs de vignes et d’oliviers organisent le lieu. Le visiteur découvre en arrivant les vestiges d’un appentis. C’est là dans l’entre deux de la montagne et du vignoble que Thierry Géhin décide d’intervenir. Il propose dans le dedans du dehors de mêler réel et fiction. Aux gris infinis du calcaire et aux tonalités arides du lieu il oppose un rose et un bleu vifs et pose sur le sol de gravier blanc des architectures géométriques en référence aux ermitages de montagne. Nayoungim et Grégory Maass, nouvellement arrivés, questionnent déjà le lieu. Il est à prévoir qu’à leur habitude ils sauront détourner la proposition du paysage chaviré par un pied de nez impertinent et absurde. Leurs interventions toujours pleines d’humour et de dérision à l’intersection entre la production en série et l’artisanat introduira une nouvelle perception des espaces et une relecture légère mais néanmoins sensible d’un site que l’art a oublié d’oublier.