Patrick Faigenbaum

Photographies, 1974-2020
Exposition
Photographie
Galerie Nathalie Obadia Paris 04
Nature morte avec pastèque, feuille de laurier, hélichryse et pierre à feu

Nathalie Obadia est heureuse de présenter la troisième exposition personnelle de Patrick Faigenbaum dans sa galerie, après les expositions Kolkata/Calcutta en 2015 et Santulussurgiu en 2008. À la suite de l’importante exposition Patrick Faigenbaum, Fotografien 1974-2020 (3 juillet – 21 novembre 2021) qui lui a été consacrée au Josef Albers Museum Quadrat Bottrop (Allemagne), la Galerie Nathalie Obadia présente, dans une volonté rétrospective, un ensemble choisi de photographies de l’artiste, des premières images aux séries les plus récentes.

Né à Paris en 1954, Patrick Faigenbaum a d’abord été formé à la peinture, avant de se tourner dans les années 1970 vers la photographie. Pensionnaire à la Villa Médicis à Rome de 1985 à 1987, il se fait connaître avec la série argentique en noir et blanc Familles Italiennes (1984-1991), dans laquelle il fait poser des familles aristocratiques habitant des palais italiens d’un autre temps.


Le portrait peut être anonyme, sans perdre ni sa force, ni sa qualité distinctive. En juillet 1974, Patrick Faigenbaum a vingt ans ; il marche dans la ville de Boston quand il voit un homme sur un banc, le visage caché, le corps ramassé, dans une attitude ambiguë de douleur ou de repli. Le mur derrière lui est strié par l’ombre des feuillages, coups de pinceaux naturels sur un mur de béton. La photographie qu’en fait l’artiste touche « la limite où le portrait tend à se dissoudre dans l’immense domaine du pittoresque »,1 comme le souligne le critique d’art Jean François Chevrier. Une image solitaire qui fait écho à son ensemble le plus récent, Rue de Crimée, également présenté dans l’exposition. Les quatre photographies nous donnent à voir, sans voyeurisme ni misérabilisme aucun, des sans-abris vivant dans la rue adjacente à celle du domicile de Patrick Faigenbaum. Des acteurs de sa vie quotidienne, dont l’occupation du même espace urbain semble être le seul point commun, la froideur de la couleur faisant écho à la dureté de leur vie suggérée par les images. La dignité des modèles de Patrick Faigenbaum traverse tout son travail ; son objectif donne aux figures qu’il photographie – Samantha, Eržika et tous les autres, proches ou anonymes –, « une place et une stature, un sol et un cadre stable ».2


Les villes, habitées et visitées, portraiturées comme des personnages, sont une autre composante majeure du corpus de Patrick Faigenbaum. C’est lors d’un séjour à Prague, au début des années 1990 (il avait découvert la ville en 1984) que son regard s’est déplacé : des portraits à la ville, du tissu urbain aux habitants, ne faisant plus de distinction entre ces deux sujets. Une invitation à Brême (Allemagne), entre 1996 et 1998, lui donne l’occasion d’expérimenter pour la première fois la prise de vue en couleur. La région de Calcutta (Inde), qu’il visite plusieurs fois à la suite du Prix Henri-Cartier Bresson qu’il obtient en 2013, est l’occasion d’une série de photographies décisive, dans laquelle on retrouve tous les motifs qui lui sont chers. Par un « réseau de complicités », Patrick Faigenbaum y rencontre des intellectuels, artistes, cinéastes bengalis, comme en témoigne la capture instantanée, au détour d’une performance, du renommé sitariste Budhaditya Mukherjee. Le regard photographique, qui se sait étranger, est bienveillant et curieux du lieu où il se trouve, et de ceux qui y évoluent.


« Ce qui distingue aujourd’hui l’approche de Faigenbaum – le terme “approche” me paraît juste – tient à sa façon de transcrire une relation empathique, c’est à dire le ressort du pathos, en un traitement ouvertement pictural ou plastique du motif. »3


Ses représentations de la figure humaine combinent la « nécessaire distance » entre l’artiste et son modèle et une « intimité fugace ».4 Dans les portraits de la mère de l’artiste, Suzanne Faigenbaum, disparue en 2015, l’intimité se fait tendre et poignante. Un ensemble de quatre images la montre assise face à l’objectif dans une blouse bleue. Elle apparaît fragile, le regard presque perdu. Une mosaïque de soixante-six photographies couleur « enregistre », entre documentaire et journal intime, son vacant après sa disparition. Patrick Faigenbaum a voulu garder les traces des objets, des meubles, et des habitudes que l’on devine dans cet intérieur, « comme un tableau en creux de la présence disparue. »5


Depuis la fin des années 1990, l’artiste est amené à séjourner fréquemment en Sardaigne, dans le village rural de Santulussurgiu d’où est originaire sa compagne, Angela Ledda - il y photographie Salvatorica Sechi, la mère d’Angela, dans sa vie quotidienne. Dans les photographies prises à Santulussurgiu, le soleil italien éclaire les lieux et les fruits. Patrick Faigenbaum compose avec attention des arrangements de raisins, pastèques, et autres fruits. Ses natures mortes aux riches couleurs font échos à la peinture hollandaise du XVIIe siècle. Elles « forment un paysage en modèle réduit, où les objets peuvent être idéalement combinés, associés, distribués dans la lumière, et cela à la manière des figures multiples qui composent un portrait de groupe ».6


Par une attention accrue portée aux personnages comme aux objets, aux visages comme aux paysages, l’œuvre varié de Patrick Faigenbaum donne au portrait, ce « genre hors des genres »,7 de multiples définitions. Les œuvres rassemblées dans cette exposition rétrospective en témoignent.

 

 

 


1 Jean-François Chevrier, « Êtres et images », Vancouver Art Gallery/ Académie de France à Rome – Villa Médicis, 2013.

2 Jean-François Chevrier, Patrick Faigenbaum. Fotografias, 1973-2006, Centro de Arte Moderna José de Azeredo Perdigão - Fundação Calouste Gulbenkian, Lisbonne, Portugal.

3 Jean-François Chevrier, Patrick Faigenbaum, Fotografien, 1974-2020, éd. Heinz Liesbrock et Jean-François Chevrier, Bottrop, Albers Museum / Munich, Schirmer-Mosel, 2021.

4 Kathleen S. Bartels, « Introduction », Vancouver Art Gallery/ Académie de France à Rome – Villa Médicis, 2013.

5 Jean-François Chevrier, Patrick Faigenbaum, Fotografien, 1974-2020, op. cit

6 Ibid.

7 Jean-François Chevrier, « Noir et blanc ou l’éclairement », Patrick Faigenbaum. L’Éclairement, éd. Xavier Barral, 2014.

 

Horaires

Lundi - Samedi, 11h - 19h

Adresse

Galerie Nathalie Obadia 3 rue du Cloitre Saint-Merri 75004 Paris 04 France
Dernière mise à jour le 13 octobre 2022