Palagonia POV

Exposition
Arts plastiques
Michel Rein, Paris Paris 03

 

« […] Le Prince Palagonia donne la plus libre carrière à son goût et à sa passion pour les formes laides, monstrueuses, et on lui fait beaucoup trop d’honneur en lui accordant seulement une étincelle d’imagination. » Goethe, Voyage en Italie.

 

Une photo prise par Henry Clarke en 1967 pour le magazine Vogue met en scène la modèle Benedetta Barzini en robe de soirée juchée sur des statues de la Villa Palagonia (Bagheria, Sicile). Bien que peu inspiré, le cliché n’est pas sans rappeler certains films fantastiques comme ceux de Mario Bava au charme romantique du faste déliquescent.

Sensible à cette mise en scène mêlant un décor fantasmagorique pauvre, des apparats luxueux et en résonance avec la visite de la Villa faite quelques mois plus tôt, Armand Jalut élabore pour sa quatrième exposition à la galerie une nouvelle série de peintures, convoquant autour d’une de ces sculptures excentriques, sorte de Vénus d’Ille de série B aux accents de chimère, de la joaillerie, un cendrier en verre de Murano et autres signes de raffinement bourgeois tels qu’un verre de spiritueux.

 

Cette curiosité touristique qu’est la Villa Palagonia aussi appelée Villa dei Mostri, se parcourt comme les vestiges d’une production Roger Corman, version baroque, laissée à l’abandon. Impression similaire à la visite des studios de cinéma où l’imagination reconstitue les fonctions possibles de chaque objet dans la narration, où le moindre vestige revêt une anecdote.

 

Ces props sont une nouvelle fois érigées au statut d’artefact par l’artiste, mis au service de compositions quasi aléatoires qui au-delà d’un principe de collage et de combinaisons fortuites, subissent une gamme d’effets spéciaux cheap (déformation, flou, découpage, détachement du motif), un  corpus de gestes qui renvoient à un point de vue subjectif (POV : Point Of View) sous influence. En combinant ou en isolant les motifs sur des fonds abstraits aux effets chromatiques surjoués, Armand Jalut stratifie les sujets et manipule les textures.

L’élaboration de cette nouvelle série est le prétexte pour rassembler au sein de l’exposition la bizarrerie et les valeurs esthétiques relatives aux sujets d’inspiration « antique » et « bling-bling ». Elle trouve son origine dans le désir de l’artiste d’articuler des connexions sensibles entre des objets sophistiqués, recherchés, parangons de la presse mode et l’exotisme baroque d’un décor qui tombe en désuétude.


L’espace de la galerie retrouve alors les atours d’une scène où la bande son composée par Nicolas Dubosc, suggère une atmosphère,  illustre un scénario possible, des fragments d’histoire, dont le spectateur et les œuvres sont à tour de rôle acteurs et figurants.

Artistes

Adresse

Michel Rein, Paris 42 rue de Turenne 75003 Paris 03 France
Dernière mise à jour le 2 mars 2020