journal horsd'œuvre n°24
Récits d’aventures, comptes rendus, actions, work-in-progress… Sans être pour autant qualifiées de « performances » certaines pratiques se définissent par l’acte (en) lui-même plutôt que par leur mise en forme. Œuvres réalisées hors champ traditionnel ou conventionnel de l’art (atelier, exposition, médium classiques), elles posent d’emblée la question de leur propre visibilité et de leur « durée de vie » (que deviennent-elles après l’acte ?). En face de quoi se retrouve-t-on si l’œuvre ne peut se montrer (faute d’objet), si sa réalité échappe à tout code ou mode d’exposition connu, ou si cet acte ne laisse aucune trace tangible ? Dans ces formes d’art qui tendent à délaisser l’objet au profit de situations, d’intentions, de stratégies ou d’expérience, il y a un désir d’immatériel évident. Stephen Wright s’est interrogé sur l’absence [qui] a toujours eu à travers la modernité – à cause de la déprise de toute tradition qui la définit – une dimension métaphysique, que l’on voit, par exemple, dans une bonne partie de la peinture abstraite. Alors, que sont ces gestes dématérialisés interrogés s’ils ne s’inscrivent pas dans le concret ou le réel ? Depuis les origines (Yves Klein) jusqu’aux pratiques plus récentes de Yolanda Gutiérrez, Cécile Desbaudard pointe le « degré d’inscription dans la réalité » des pratiques artistiques. Des expériences vécues dont l’aboutissement n’est pas forcément l’exposition (Lydie Jean-dit-Pannel, Vincent Carlier, Jean-Christophe Norman) au pur évènement ne laissant aucune trace (Tino Seghal), sont explorées les notions de présence cachée et d’absence. Dans ce processus de dématérialisation la figure de l’auteur est mise à mal jusqu’à sa propre disparition (Edouard Boyer)… et reconstruite artificiellement par des doubles virtuels qui rejouent des performances d’autres artistes (Eva et Franco Mattes). Se trouve-t-on alors devant l’œuvre ou sa représentation ? Et si « œuvre » ne rime pas avec visibilité, peut-on se passer de la vision de l’œuvre ? Ou plutôt, l’œuvre, peut-elle se passer de la vision du spectateur ? Bertrand Charles
Complément d'information
This is so contemporary ! Les « situations construites » de Tino Seghal : article de Adeline Blanchard
La Fiction comme expérience : les sythétic perfomances d’Eva & Franco Mattes : article de Virginie Bobin
La matière du dépassement - Jean-Christophe Norman : article de Bertrand Charles
Dématérialisation et/ou invisibilité de l’œuvre : article de Cécile Desbaudard
L’utilité du futile et du dérisoire - les actions de Jérémy Laffon : article de Caroline Engel
Lydie Jean-Dit-Pannel Le papillon Monarque, animal totémique : article de Martine Le Gac
la traversée de l’Atlantique - entretien avec Vincent Carlier : article de Nadège Marreau
S’effacer, c’est être léger, c’est accueillir - Edouard Boyer
: article de Marie-France Vô
Autres artistes présentés
Tino Seghal, Lydie Jean-Dit-Pannel, Eva & Franco Mattes...