Jonier Marin

PORTRAITS
Exposition
Arts plastiques
Galerie Lara Vincy Paris 06
© Jonier Marin, "Michel Foucault", 2023

J’ai été agréablement surpris en apprenant que la galerie Lara Vincy à Paris présentera à la rentrée une nouvelle exposition de Jonier Marin et surtout étonné puisqu‘il s’agira cette fois, non pas de points d’interrogation, constante axiale de son travail, mais de PORTRAITS.
Permettez-moi de me présenter : déjà en 1986 à l’occasion d’une exposition de Raymond Hains dans cette même galerie, j’avais écrit une note sur J. Marin, artiste français né en Colombie en 1946. Retenu à Londres, je me limite à reproduire et commenter ici la courte note manuscrite qui m’a été envoyée par Marin à titre d’invitation :

« Cher Braxton, j’ai pris la décision de montrer à la galerie Lara Vincy à Paris en septembre prochain un ensemble de portraits. J’espère avoir l’indulgence du public avec cette tentative, étant donné que le sujet principal de mes recherches est d’un autre ordre depuis 1979. La plupart de ces dessins datent des années 70 jusqu’à aujourd’hui. J’en déduis que sur chaque visage, il y a une parole écrite par le temps qui pourrait très bien nous définir. Je me souviens de ce petit dessin crayonné au musée du Louvre du côté de la peinture flamande d’un maitre d’école indigné, et même surpassé, par la pagaille de ses élèves. Pourquoi s’occuper encore de portrait aujourd’hui ? Baudelaire craignait avec raison que depuis l’apparition de la photographie, il serait vain de vouloir atteindre le niveau de Rembrandt ou de Goya. Aujourd’hui, les smartphones nous permettent de choisir parmi plusieurs selfies, ratés ou non, celui qui peut nous convenir. »

Je viens également de recevoir par e-mail quelques images de cette exposition très variée, surprenante même, et je constate que dans ces dessins, il s’agit d’un « fa presto » qui ne s’embarrasse d’aucune retouche. Je constate que de plus en plus d’artistes se déclarent curateurs de leur propre travail. Ainsi, Marin choisira une centaine de dessins de son fond d’atelier pour nous parler avec un certain culot, de la consommation tellurique de notre monde contemporain.
Quel est son but en montrant cet ensemble ? Probablement de se présenter comme quelqu’un qui va au-delà de l’art d’aujourd’hui, devenu selon Yves Michaud, « une matière gazeuse ». Modestie fondamentale de la part de quelqu’un qui aura toujours un nouveau projet à proposer. Je pense par exemple à son dollar vertical. Je situe ses portraits en plusieurs catégories : le portrait apparent, celui qui se représente à nous face au miroir ; celui « philosophique » selon Kobo Abe, le japonais lauréat du Prix Akutagawa en 1951, qui dans son roman La face de l’autre à la page 48, demande à la tête de mort : « Quel fut ton visage ? ».
Il faut tenir compte que jusqu’à très récemment, n’importe quelle image nous représentait. Avec l’apparition des smartphones, d’après Marin, rien ne signifie plus rien ; adieu la psychopathologie quotidienne du bon vieux Sigmund. Notre image iconique devient alors indéfinissable en raison d’une mutation constante. In fine, qui est qui ? La question demeure.
Une autre approche pourrait se situer dans l’autoportrait imaginaire, qui pour finir, se réfèrerait à un concept de vie matérialisé en attitudes et activités, en somme, nous voir avec des yeux entre-ouverts.

John Braxton, Londres, septembre 2023
Traduction Jonier Marin

Artistes

Adresse

Galerie Lara Vincy 47 rue de Seine 75006 Paris 06 France
Dernière mise à jour le 2 novembre 2023