Gábor Ősz

Spomen
Exposition
Galerie Loevenbruck Paris 06
© Photo Fabrice Gousset, courtesy galerie Loevenbruck, Paris.

Spomen (Souvenir)


En serbo-croate, spomenik signifie cénotaphe ou monument commémoratif. L’ancien président yougoslave Josip Broz Tito a fait ériger les Spomeniks entre la fin des années 1950 et les années 1980 afin de commémorer les champs de bataille de la Seconde Guerre mondiale et les sites des camps de concentration.
Ces monuments conçus par différents sculpteurs ont une allure impressionnante destinée à affirmer la force et l’assurance de la République fédérative socialiste. Ils attiraient des millions de visiteurs annuels, en particulier les « jeunes pionniers » qui recevaient une « éducation patriotique ». Après la dissolution de la République fédérative au début des années 1990, ils sont tombés dans l’oubli et leur portée symbolique s’est perdue à jamais.

Les Spomeniks se dressent à présent en pleine nature, loin des villes et de la vie urbaine. Cela ne fait qu’accentuer leur aspect imposant, mais ce qui les rend vraiment extraordinaires, c’est qu’ils sont tous de style abstrait, comme si les artistes avaient voulu couler leurs sentiments dans le béton, comme s’ils s’étaient débarrassés des formes figuratives narratives pour détourner le récit de son sujet : l’héroïsme, le pouvoir et la conquête de l’indépendance.
Pendant la Seconde Guerre mondiale, la Yougoslavie abritait le plus important mouvement de partisans, et c’est quasiment la seule nation qui ait réussi à se libérer sans aide extérieure. De ce fait, elle occupait une place à part après la guerre, et pas seulement dans la région, mais dans toute l’Europe. Elle semblait adopter de son plein gré un régime communiste, sans subir l’influence soviétique.

En regardant les Spomeniks, on mesure à quel point les formes abstraites sont capables de véhiculer du sens et de l’émotion. Ces monuments sont souvent géométriques ou biomorphes, ce qui a éveillé mon intérêt. Je n’avais pas envie de faire des photographies documentaires, mais d’arriver à capter les sentiments suscités par leurs formes abstraites pures. C’est pourquoi j’ai décidé d’utiliser des chambres noires et de les construire en suivant les contours des éléments géométriques des sculptures.
Les formes géométriques ont fait renaître en moi une vieille idée, une théorie sur les relations entre l’image et les volumes géométriques. J’ai sélectionné quelques Spomeniks sur lesquels je souhaitais me concentrer, en choisissant ceux qui se composaient de cubes, cylindres et tétraèdres.
En dehors des disciplines scientifiques, il existe de nombreux exemples d’utilisation architecturale ou métaphorique des volumes géométriques, car on leur a attribué au fil de l’histoire des propriétés mystiques, ésotériques, religieuses ou symboliques. Censés posséder des pouvoirs particuliers, ils ont été employés dans de nombreux domaines de l’art, comme ici, où ils devaient exprimer le pouvoir des partisans.
Les chambres photographiques que j’ai construites prennent la forme des monuments sélectionnés et sont assez grandes pour accueillir sur toutes leurs parois internes les plans-films de 20 x 25 cm avec lesquels je veux travailler. Elles fonctionnent comme des chambres noires tout en enregistrant des images des volumes géométriques à 360° sur la totalité de la surface intérieure. L’image obtenue revêt son apparence définitive une fois étalée à plat afin de créer un certain motif. Ce système d’images compliqué, dans un dispositif d’accès difficile, ajoute un degré d’abstraction supplémentaire.

Les images définitives n’interprètent pas la sculpture géométrique et sa valeur métaphorique, mais elles les déconstruisent afin de recomposer le sens symbolique. Il s’agit de voir comment les relations entre les divers aspects s’infléchissent dans ce reflet bizarre, et si la déconstruction peut signaler la découverte d’une reconstruction différente. Les éléments abstraits nouvellement créés transmettront, je l’espère, un sens recomposé.


Gábor Ősz

Complément d'information

Prix, bourses et résidences obtenus par Gábor Ősz :


2010 : Prix BMW - Paris Photo
2009 : Bourse,Foundation for Art, Design & Architecture, Amsterdam, Pays-Bas
2005 : Résidence, Villa Arson, Nice, France
2002 : Résidence, Project Atelier - Berlin Foundation for Art Design & Architecture, Allemagne
2001 : Bourse, Centre National de l’Audiovisuel’s Mosaïque Programme Awards, Luxembourg
1999 : Vrije Opdracht Fotografie, Amsterdam’s Foundation for Art, Amsterdam, Pays-Bas
1998-2006 : Bourse, Foundation for Art, Design & Architecture, Amsterdam, Pays-Bas
2001, 2003, 2004 : Bourses de
la Foundation for Art, Design & Architecture, Amsterdam, Pays-Bas 1993–1994 : Résidence, Rijksakademie van Beeldende Kunst, Amsterdam, Pays-Bas
1992 : Résidence, Skidmore College, Saratoga Springs, New York, USA Bourse d’étude, Soros Foundation, Budapest, Hongrie
1988 : Bourse, Derkovits, Székesfehérvár, Hongrie
1986 : Prix Smohay, Szt. István Király Múzeum Székesfehérvár, Hongrie


L’Oeuvre de Gábor Ősz figure dans les collections publiques et privées suivantes :

France : 
Centre Pompidou – Musée national d’art moderne
Fonds National d’Art Contemporain
(FNAC)
Fondation Louis Vuitton
Fondation Francès
Frac Franche-Comté
Musée de la Roche-sur-Yon International :
Stedelijk Museum Amsterdam,
Pays-Bas
FOAM, Amsterdam, Pays-Bas National History Museum, Arnhem, Pays-Bas
AkzoNobel Art Foundation, Amsterdam, Pays-Bas
Gemeentemuseum The Hague,
Pays-Bas
Ludwig Museum of Contemporary Art, Budapest, Hongrie
Modern Múzeum, Pécs, Hongrie Achmea Kunstcollectie, Pays-Bas Rabo Bank Collection, Pays-Bas Museum Schloss Moyland, Allemagne

Artistes

Horaires

Mardi - Samedi, 11h - 19h.

Adresse

Galerie Loevenbruck 6 rue Jacques Callot 75006 Paris 06 France
Dernière mise à jour le 13 octobre 2022