Exposition JEAN XAVIER RENAUD

Exposition
Arts plastiques
Galerie Françoise Besson Lyon
Le Lichen Il était une fois, il y a bien longtemps, avant que les chiens n’envahissent les campagnes et se demandent si l’humanité a vraiment existé, un artiste qui vivait sur un plateau, dans les montagnes du Jura. Il s’appelait Jean-Xavier Renaud. Ses biographes ont retenu qu’il aimait courir dans les bois. On dit aussi qu’il aimait rire, c’est du moins ce qu’il avait déclaré un jour où on le pressait de délivrer les secrets de son art, dans un de ces catalogues que les bibliophiles s’arrachent aujourd’hui à prix d’or. Au vu de ce qui nous est parvenu de ses œuvres, ce rire semble avoir été joyeux, jaune, moqueur et caustique, relié à une observation précise du monde, dans ses petites choses comme dans ses manifestations les plus spectaculaires. Jxr était tantôt amusé, tantôt indigné, ses objets d’indignation réalisant assez vite leur infortune si jamais il leur était donné de voir la peinture ou le dessin dont ils étaient le sujet. Il savait être ému par un mur couvert de lichen, un chien fatigué ou un site pluvieux, émotions qu’il prenait le temps de transcrire au moyen d’aquarelles aux coloris subtils et attentifs à l’éphémère beauté de la nature, nature qu’il tentait de préserver du mieux possible au travers de ses engagements électifs. Il n’y avait rien de sectaire chez lui, il était ouvert à la discussion, mais s’il apprenait qu’un projet de route risquait d’empêcher une salamandre de faire sa promenade dominicale, alors il devenait féroce, férocité qu’il savait parfaitement transposer en peinture. Ses œuvres n’étaient cependant pas engagées dans le sens réaliste socialiste que certains ont voulu accorder à ce mot. Elles n’étaient pas édifiantes. Elles étaient juste un mode d’action immédiat, une réaction citoyenne, à la façon dont le chanteur Woody Guthrie désignait sa guitare comme un instrument qui tuait les fascistes. De même, Jxr aurait pu dire que deux ou trois couleurs bien assemblées permettent parfois de faire régresser certains états de bêtise inhérents aux sociétés humaines. L’économie de moyens était une constante de son travail et souvent quelques traits d’encre sur une feuille de papier lui suffisait à décrire une situation, à la manière dont un George Grosz dénonçait les travers d’un monde condamné. Cependant, si le contenu fut moteur dans son œuvre, la forme ne lui était jamais sacrifiée. Elle venait renforcer et appuyer la narration, et même parfois lui échappait pour s’affirmer à la surface de la toile de manière autonome et détachée d’un sujet trop déterminé ou descriptif. Les lettres, les mots, jouaient avec le sens, en slogans détournés s’incarnant en parties prenantes du medium, qu’il soit huile, encre ou pastel. Ces inscriptions devenaient elles- mêmes images, renversant le sens, dérapant vers des représentations triviales, obscènes, électrochocs visuels à l’efficacité ravageuse. L’obscénité est la chose la mieux partagée du monde, un état universel, c’est ce qui apparaissait dans ces représentations crues, fantasmatiques, jouant avec la bienséance, de manière cruelle, ironique, et joyeuse. Ainsi Jxr aimait rire, et il aimait aussi jouer, d’où sa passion pour les jeux vidéos, propagateurs de scènes parfois cocasses comme celles qui lui servaient de motifs. Il aimait jouer avec les figures et le sens dans ses compositions et également, parfois, avec les nerfs de ses collègues du conseil municipal, dans de grandes peintures où il mettait en scène ce qu’il avait observé et entendu des débats de cette assemblée, sorte de survivance de la Grèce athénienne au début du XXI°siècle. Aujourd’hui où nous avons perdu le sens de ces représentations, il demeure, à la vue du tableau intitulé « la Réunion », l’évidence d’un sublime morceau de peinture, à la fois uni et disparate, entre sa nature morte au premier plan et le dégagement sur le paysage hivernal du Jura, avec sur le côté un autoportrait du peintre témoignant peut-être des contrariétés éprouvées durant ce type de séance. Il y a là une représentation sociale, une description à la manière des peintres hollandais du XVII ° siècle, ou plus proche de Jxr en terme temporel, à la manière du peintre Jed Martin, héros du roman de Michel Houellebecq, « La Carte et le Territoire ». Écoutons d’ailleurs ce que disait ce même Houellebecq : « Auparavant, quand je pensais à la peinture, je ne mesurais pas cette capacité qu’elle a de dire une vérité sociale ». (note 1) Il semble que cette capacité de dire une vérité sociale fut le cas de cette « Réunion », chef d’œuvre présenté à l’exposition collective Dynasty (note 2), tableau qui ne fut pas, comme souvent, reconnu à sa juste valeur en son temps. Sans doute s’agissait-il d’un de ces « objets premiers » décrits par l’historien de l’art George Kübler, un objet esthétique fondateur d’une longue lignée, lignée confirmée par les faits puisque ce tableau devait faire école dans les décennies qui suivirent. Marc Desgrandschamps

Complément d'information

A cette occasion, l'artiste dédicacera la monographie retraçant les 5 dernières années de son œuvre, éditée par la galerie Françoise Besson

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JEAN XAVIER RENAUD

Horaires

Exposition présentée du 17 septembre au 05 novembre 2011 de 14h30 à 19h00 et tous les jours sur RDV. En résonance à la biennale de Lyon

Accès mobilité réduite

Oui

Adresse

Galerie Françoise Besson 10, rue de Crimée 69001 Lyon France
Dernière mise à jour le 2 mars 2020