Eric Tabuchi HYPERTROPHY

HYPER TROPHY, sorte de vision panoramique balayant quelques années d’un travail dont la substance pourait être la constance, regroupe 360 photographies classées thématiquement en douze volumes à la fois solidaires et autonomes. Tel un LP contenant autant de titres ou encore un recueil de nouvelles, HYPER TROPHY fonctionne sur le principe de la partie et du tout, du simple et du multiple. Douze séries donc, comme le tour d’un cadran, le cycle annuel divisé en mois ou bien une boucle qui se referme sous la forme d’une archive revisitant la fiction d’une capture exhaustive du réel. Traitant d’objets aussi éloignés en apparence que des restaurants chinois dans les villes de province, des skateparks à la campagne, des devantures de commerces intégrant le mot “concept” dans leur nom ou des bouquets de fleurs commémorant des victimes de la route, HYPER TROPHY, en dressant le répertoire des objets sans qualité qui exemplairement infiltrent les bordures, les bas-côtés du paysage contemporain, trouve dès lors toute sa cohérence. Un projet : les marges du paysage vernaculaire français (celui du nord de la Loire plus précisément) qui, loin des clichés habituels, se révèle plus instable, expérimental à sa façon ; un territoire qui par ses approximations, ses improvisations, ses renoncements et ses révoltes (et qui sont l’objet véritable de ce livre) s’adapte, passif et volontaire, à la mutation globale. De l’inventaire de ces objets - dont l’une des constantes serait l’humilité - il ressort la vision d’un territoire aux contours incertains, aux frontières indécises, héroïque et pathétique ; le lieu de l’errance tout autant qu’un espace à la recherche de sa propre identité. Et la route : ce fil forcément conducteur. Des dizaines de milliers de kilomètres parcourus à l’intérieur de ce périmètre volontairement restreint aux limites de “l’ici” en quête de ces folies ordinaires, de ces anomalies subliminales, de ces dissonances presque inaudibles pour, finalement, une hypertrophie du banal qui convoiterait le désir d’un paroxysme permanent, une somme qui, dans l’accumulation jubilatoire des formes et des signes, tenterait d’exorciser l’intuition d’un déclin inexorable. Objet équivoque, à la fois libre et contraint, sentimental si on peut dire et objectif, formel et foncier, sombre et joyeux aussi, HYPER TROPHY envisage assez sérieusement la possibilité d’un désastre ludique, de l’abandon comme alternative à l’écrasement qu’impose la norme. 12 vol. 480 p. Format : 17 x 21 cm Sortie prévue : janvier 2010