Entre Arbre et Cible

Exposition
Arts plastiques
Galerie Françoise Besson Lyon

Arbre Cible,Fluidité colorée
2014
Gaufrage, gouache,rouille, encre de Chine
dispositif plexiglas 90

 

Après Liage en 2007, première exposition personnelle à la Galerie Françoise Besson, Mise en Cible en 2012, Chantal Fontvieille propose une nouvelle déclinaison, Entre arbre et cible du 4 février au 29 mars 2016. Cette exposition résonne avec l’installation que l’artiste proposera à Art Paris-Art Fair au Grand Palais du 31 mars au 3 avril 2016.

 Marie-France Grange dresse dans son livre De pierre, de plomb et de papier, un inventaire du travail de Chantal Fontvieille sur le « motif de la cible » :

« Déclinées en pierre, béton, plomb, papier, toile, carton, insérées dans des boîtes ou alignées à la suite des autres, les cibles de Chantal Fontvieille ont pratiquement toujours été installées que ce soit seules ou, comme c’est le cas le plus souvent, groupées.

Que se glisse-t-il derrière cette figure sans cesse reprise ?

La cible, élaborée par l’artiste, c’est le corps dressé que l’on cherche à prendre, à toucher et qui demeure, immuable, en face, à distance. Meurtrie et abîmée, froissée, elle réifie notre violence, nous enserre dans son mutisme. Elle nous traverse et nous cloue, dans un espace, devenu le temps d’un revers, le sien.

Elle incarne la perte, dans son absolu et sa totalité, le deuil impossible, la mélancolie ressassante. » 

Arbre-cible

A l'atelier, Chantal Fontvieille entreprend la métamorphose de la cible. Elle creuse à la gouge des rondins de troncs d'arbre qui serviront à gaufrer les cibles. En creusant se découvre la vérité de l'arbre, sa vie en profondeur - tous les événements ou accidents qui ont marqué son parcours : coups de hache, sécheresses, croissance, maladies, rencontres...

Puis le gaufrage sous presse éprouve la matière de la cible, ajoute à celle-ci forme, relief et déchirures, souligne et accroît sa dimension vulnérable. Le gaufrage évoque le temps : temps de l'arbre, temps de la cible, notre propre temps de vie. Ce temps se fond dans l'espace.

Le support-cible devient un nouveau lieu où se superposent et se combinent toutes les strates de dégradation et de réparation de la matière, qui engagent le corps et le mental : impacts du tir, rouille du temps, gaufrage des cernes de vie de l'arbre. L'identité, l'individualisation de la cible sont le fruit de ces actions intentionnelles qui jouent avec les limites de la matière comme aussi du hasard. Parmi elles, l'eau, en mouvement (à l'image de notre époque), dissout l'encre de Chine, la couleur, cause l'apparition de la rouille, érode la cible.

 Cible-racines

Vu depuis ses racines, l'arbre offre un tracé ouvert, singulier, résolument excentrique. Les cibles- racines mettent en œuvre et en scène autrement que par le gaufrage la relation entre l'arbre et la cible. Elles détournent du centre, mènent hors de la cible, hors cadre, hors territoire. La racine évoque la verticalité de l'arbre, son ancrage dans la terre en relation avec une cime qui tend, elle vers le ciel. Travailler sur des racines permet à Chantal Fontvieille d'approfondir une dimension présente dans tout son travail : la face cachée. La racine appartient au monde caché du sous-sol. Son organisation rhizomatique échappe à l'œil nu. Cette modalité donne autant à penser que l'arborescence. L'arbre-cible interroge la trajectoire résistante du vivant.

Dans son texte Quatuor des intensités cibliques, Joël Couve nous propose une autre lecture du travail de Chantal Fontvieille :

 « Si la cible est à ce point importante, c'est que sur elle passent la terre et la nature, passe le flux du vivant. La cible, c'est le monde avec toute sa beauté et sa cruauté, avec les forces qui le composent et le déchirent. (…) Pour reprendre G. Deleuze « chaque corps, si petit soit-il, contient un monde, en tant qu'il est troué de passages irréguliers, environnés et pénétrés par un fluide de plus en plus subtil ». La cible est une interface entre intériorité et extériorité, entre matière et non matière, entre physique et métaphysique, entre concret et abstrait, entre corps et incorporel, entre fini et infini, entre chaos et cosmos. Elle est donc l'objet-sujet de référence plastique et esthétique absolu. N'oublions pas également que pour Chantal Fontvieille la cible est le statut générique de notre condition humaine et qu'elle est réversible puisqu'elle est indissociable du tireur qu'elle inclut. Pour ouvrir les multiplicités contenues dans son agencement, Chantal Fontvieille territorialise le quatuor cible-racines-bois-rouille. En effet, la cible dans sa permanence est ici réajustée à ce nouvel agencement qui la place dans un rapport inédit avec la terre, la nature, le cosmos. »

Adresse

Galerie Françoise Besson 10, rue de Crimée 69001 Lyon France
Dernière mise à jour le 2 mars 2020