Design graphique : Pratique + Critique

Conférence
Design graphique
École nationale supérieure des arts décoratifs Paris 05

- Mardi 20 février - Olivier Lugon « Livres de lumière » : arts graphiques et projection au XXe siècle

Envisagée dès le début du XXe siècle, la migration de l’édition du papier vers l’écran a donné naissance, bien avant l’essor du numérique, à une série de « formes nouvelles du livre », selon la formule de Paul Otlet et Robert Goldschmidt en 1906, n’existant que par la projection. À travers l’exemple du film fixe dans les années 1910, du livre de diapositives dans les années 1950 et des modalités multiples du diaporama dans les années 1960-1970, la présentation reviendra sur la façon dont ces mutations ont amené typographes et graphistes à se concevoir de plus en plus comme « audiovisualistes » (Gérard Blanchard sur Albert Hollenstein, 1974). Pour certains d’entre eux, il s’est agi, en rapprochant ainsi arts graphiques et spectacle vivant, de faire de la communication un « événement » (Yann Berriet, 1972) et de la publication l’occasion d’un échange social.

Olivier Lugon est historien de la photographie, professeur à l’Université de Lausanne (section d’Histoire et esthétique du cinéma/centre des Sciences historiques de la culture). Spécialiste de la photographie du XXe siècle, de l’histoire de la scénographie d’exposition, de l’édition illustrée et de la projection, il codirige avec Christian Joschke la revue Transbordeur : photographie, histoire, société. De 2024 à 2028, il dirigera le projet de recherche « Le graphisme pour l’écran : diapositive, film fixe, cinéma, télévision (1945-1980) ».

- Mardi 27 février - Léonore Conte «1987 en France, la culture graphique se porte-t-elle si bien ?»

Le manifeste constitue un « mouvement singulier d’inscription et de rupture, de marque et de retrait, ce lieu d’invention, entre un dedans et un dehors, qui produit de nouvelles écritures de l’histoire » (Serge margel, « Le temps du manifeste », Lignes, Vol. 40, no1, 1er décembre 2013, p. 7.). Sa capacité à se positionner à l’écart et parallèlement à l’histoire officielle nous permet d’étudier ces espaces d’écriture et de pratique moins reconnus, ces lieux de discussions et de débats, dont la traçabilité nous échappe parfois. En regardant le cas spécifique de la France lors des États généraux de la culture de 1987, nous nous intéresserons aux formes que prennent la production textuelle et manifestaire des graphistes présents et à la manière dont celles-ci participent à l’élaboration d’une litératie propre au design graphique.

Léonore Conte est diplômée de l’École Estienne, de l’ENS de Cachan et agrégée d’Arts Appliqués. Elle est aujourd’hui enseignante à l’Esaat de Roubaix et docteure en design graphique, associée au laboratoire AIAC (Université Paris 8). Sa thèse porte sur la double réflexivité du manifeste en design graphique au xxe et xxie siècle et sa contribution à la culture disciplinaire en formation. Elle s’intéresse plus généralement aux pratiques de l’écrit des artistes et designers graphiques et à leurs formes de publication et de diffusion.

- Mardi 5 mars – Juanma Gomez Un miroir de l’imprimé ? Le discours typographique en France et la revue Caractère Noël

Cette conférence propose un regard sur le contexte professionnel du graphisme en France après la Seconde Guerre Mondiale, en s’appuyant sur l’examen de la revue annuelle Caractère Noël, publiée entre 1951 et 1964 et dirigée par Maximilien Vox.
Il s’agit de mettre en perspective la spécificité du contexte français de l’époque qui combine le développement de formes de résistance à la modernité, l’émergence de réponses graphiques singulières comme la Graphie latine, et l’influence croissante des professionnels suisses qui s’installent à Paris. Les évolutions techniques transforment également le champ du design graphique à cette période.
On se demandera comment la conjonction d’intérêts industriels et éditoriaux influence la posture de Caractère Noël, et comment les formes graphiques convoquées peuvent incarner symboliquement des valeurs morales, économiques et politiques, parfois indissociables de leur dimension esthétique.

Juanma Gomez intervient principalement dans les champs de l’édition, de la communication culturelle, de l’architecture et de l’art contemporain au sein de son studio Graphique-lab, et enseigne à l’ESAM de Caen le design graphique et la typographie. Il est titulaire du Master Typo/Graphic Studies du London College of Printing et du diplôme Design Éditorial de l’Istituto Europeo di Design de Madrid. Entre 2021 et 2023, il a conduit un projet de recherche à l’ANRT – Atelier national de recherche typographique, qu’il poursuit actuellement dans le cadre d’une thèse de doctorat à l’Université Paris 8.

- Mardi 12 mars - Paule Palacios et Vincent Kimyon «1982-2023. Du livre et CD ROM Le Dépays de Chris Marker à son empaysement par l’IA»

À la question « Existe-t-il à votre avis une parenté entre la mise en scène typographique et le cinéma ? », Chris Marker répondait en 1957 : « Une grande parenté. La mise en scène typographique est en fait un ersatz du cinéma ». Ce que cet écrivain, cinéaste et éditeur singulier, invente dans le paysage éditorial français, c’est le livre de cinéma (et non sur le cinéma). Ainsi de son livre Le Dépays (1982), en continuité avec sa variante interactive Immemory (1997) sur CD ROM. Aujourd’hui, le court métrage de Vincent Kimyon Tokyo Dawn Insomnia en réalise avec l’IA une adaptation fidèle. Son écriture visuelle prolonge l’archaïsme poétique du cinéaste pionnier de l’informatique pour qui « la matière électronique est la seule qui puisse traiter le sentiment, la mémoire et l’imagination ».

Paule Palacios-Dalens, docteure en « Esthétique, sciences et technologie des arts » de l’Université Paris 8 Vincennes-Saint-Denis, est graphiste. Ses recherches portent sur le lien entre cinéma, livre et typographie. Elle est l’auteure de VOX JLG, du plomb au film, paru en 2021 chez 202 éditions.
Vincent Kimyon, né en 1976, écrit, fait des vidéos et des images pour l’atelier imaginaire Mutatis Mutandis.

- Mardi 19 mars – Jérôme Knebusch Retour sur « Gotico-Antiqua » (2015-2021)

Gotico-Antiqua, proto-romain, hybride, caractères du XVe siècle entre gothique et romain est un programme de recherche mené sur plusieurs années à l’Atelier national de recherche typographique, Nancy. Il a réuni des chercheurs dans les domaines de la typographie, de la paléographie et de l’histoire du livre, en mettant l’accent sur les caractères et les diverses formes de lettres. Cette période relativement peu étudiée – après Gutenberg et avant la stabilisation du modèle de Jenson – s’étend des premières traces de tendances humanistiques aux romains «purs», en passant par de nombreux cas de dessins incertains, hybridations volontaires et formes proto ou archaïques du romain.

Jérôme Knebusch travaille sur des projets typographiques allant de la recherche au dessin de caractères, en passant par le design graphique et éditorial. Il enseigne à l’école supérieure d’art de Lorraine à Metz et à l’Atelier national de recherche typographique à Nancy. En 2019, Jérôme Knebusch a fondé Poem, une maison d’édition indépendante de caractéres typographiques, d’essais critiques et de multiples d’artistes. Plus d’infos sur jeromeknebusch.net et poem-editions.com

- Mardi 26 mars - Nicolas Taffin Promenade typothérapeutique

En mécanisant l’écriture, la typographie prend l’alphabet au pied de la lettre et compose un bond culturel dans l’humanisme critique. En transformant le geste en empreinte, elle en perfectionne les formes autant qu’elle souligne le hors-texte. Une promenade au pays de l’infra-visible pourrait faire du bien.

Nicolas Taffin est un éditeur et graphiste qui se partage entre les lettres, les images et le code. De formation philosophique, il exerce depuis 1995 dans les champs culturel et scientifique. En 2002, il a fondé C&F éditions avec Hervé Le Crosnier, maison consacrée à la culture numérique et aux communs de la connaissance.

Membre jusqu’en 2023 de l’équipe de recherche en interaction humain-machine (IHM) Ex-Situ, il a également enseigné l’édition à l’Université de Caen – Normandie et présidé l’association typographique des Rencontres internationales de Lure. Il est l’auteur de l’ouvrage Typothérapie.

Horaires

18h30, à l’École nationale supérieure des arts décoratifs, 31 rue d’Ulm (75005), amphithéâtre Rodin

Adresse

École nationale supérieure des arts décoratifs 31, rue d'Ulm 75240 Paris 05 France
Dernière mise à jour le 16 février 2024