Françoise Ploye

Connaître et conserver les impressions numériques dans les collections photographiques patrimoniales

Les années 1990 ont vu émerger les technologies d’impression numérique dans le secteur du tirage photographique professionnel, puis amateur. Les impressions numériques côtoient aujourd’hui les tirages photographiques traditionnels dans les collections de photographies contemporaines. De nombreuses questions se posent néanmoins sur la stabilité des impressions numériques, le plus souvent lorsqu’on les compare avec les tirages couleurs argentiques traditionnels. Il est vrai que les premières impressions IRIS, qui ont su séduire le milieu de l’art dès le début des années 1990 sous l’appellation de « Fine Art Printing », étaient encore très instables. Une simple goutte d’eau faisait couler les colorants et ceux-ci résistaient mal à l’exposition à la lumière. Depuis, des budgets considérables ont été investis par les fabricants dans la recherche de systèmes d’impression associant qualités esthétiques, stabilité, simplicité et rapidité. Il en résulte un véritable progrès. Cependant, le renouvellement quasi annuel des systèmes d’impression, leur complexité, les différences flagrantes de qualité d’un produit à l’autre ainsi que les déclarations parfois équivoques de fabricants sur la stabilité de leurs tirages ne facilitent pas le travail des professionnels de la conservation.

Les impressions numériques ne sont pas soumises aux mêmes processus de dégradation que les photographies traditionnelles. Les solutions de conservation et de restauration élaborées pour ces dernières ne sont donc pas directement transposables aux impressions numériques.

Cependant, dans de nombreux cas, par manque de connaissances, il est possible de les confondre. Il est par conséquent important d’apprendre à connaître ces nouvelles techniques afin de pouvoir les conserver.

Ce travail comporte en premier lieu une analyse de l’existant afin de déterminer la place réelle de ces nouvelles techniques dans les collections aujourd’hui. Nous nous concentrons par la suite sur les techniques les plus largement représentées, c’est à dire les tirages jet d’encre. L’objectif est d’une part d’apprendre à identifier ces nouvelles images et d’autre part d’en cerner les fragilités spécifiques, afin d’envisager des solutions de conservation et de restauration adaptées.

L’identification nécessite dans un premier temps un effort de classification. Cette classification fondée sur la technique, ses matériaux constitutifs, son esthétique et son usage, doit permettre une approche typologique, de la même manière que pour la photographie traditionnelle. Une telle classification n’est cependant pas figée et doit évoluer pour intégrer les nouveaux produits et surtout rester à l’écoute d’une évolution rapide des usages.

L’étude bibliographique associée aux tests complémentaires réalisés dans le cadre de notre recherche appliquée décrivent la réaction des matériaux à certains facteurs de dégradation peu pris en compte par les tests de vieillissement artificiels courants, la sensibilité à l’abrasion et aux traces de doigts, par exemple. Ces informations sont importantes, notamment pour la conservation préventive des oeuvres. Notre recherche appliquée propose par ailleurs une première évaluation des traitements de restauration envisageables sur ces techniques. Les échantillons soumis aux tests ont été réalisés auprès de laboratoires ou d’ateliers spécialisés dans la production d’impressions numériques et sont  représentatifs des oeuvres étudiées dans les collections ou caractéristiques d’une production courante.

La transmission des informations est assurée sous forme de fiches synthétiques regroupant les informations relatives à l’identification, la conservation préventive et la restauration. Enfin, pour répondre aux demandes récurrentes des responsables des collections, nous proposons un questionnaire technique simplifié destiné aux artistes au moment de l’acquisition des oeuvres ainsi qu’une nomenclature pour la désignation des techniques d’impression numérique.

Rapport de recherche
Françoise Ploye, Connaître et conserver les impressions numériques dans les collections photographiques patrimoniales
Dernière mise à jour le 21 septembre 2021