Clémence ESTÈVE

Née en 1989, vit et travaille à Douarnenez, France.

Clémence Estève est une plasticienne qui dérègle, prend soin et met en scène tout un corpus de reproductions d’œuvre d’art. Depuis des années, cette artiste iconographe a constitué patiemment un florilège d’images issues des collections des plus grands musées occidentaux. Sur son disque dur, à l’abri des regards, elle est la conservatrice et la gardienne d’une collection dont elle est la seule visiteuse, mais dont elle laisse parfois s’évader l’un ou l’autre item. Elle constitue toutefois une réflexion parallèle et essentielle sur la construction du regard, la constitution de collections, et les corrections de l’histoire par rapport à elle-même. Avec humour, elle se saisit de ces nombreuses incohérences qui méritent d’être rectifiées. Quiconque aura déjà été saisi par la même fièvre compulsive que Clémence Estève lorsqu’elle scrolle à l’infini les catalogues numériques des musées aura sans doute remarqué que les photographies qui les composent répondent à un protocole très normé: une lumière froide et écrasante annulant toute ombre ou artifice, les œuvres installées sur un fond terne. Une apparente neutralité que détourne la plasticienne grâce à sa pratique du dessin. Ces deux pratiques, la collecte curative et le dessin roboratif, se complètent lorsque Clémence Estève réalise ses œuvres, généralement constituée en ensembles qui se déploient dans l’espace. Les esquisses s’échappent des reproductions d’œuvres d’art, envahissent les murs blancs et prennent forme en trois dimensions, comme autant de persistances rétiniennes. Un doigt fier qui se libère de la carapace formée par un poing fermé, une main amicale qui se promène sur une épaule humaine, des pieds capricieux qui soutiennent des images d’un autre temps.

Extrait du texte de Andy Rankin écrit pour les Révélations Emerige 2022

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Clémence Estève is a visual artist who subverts, preserves and orchestrates a wide range of artwork reproductions. For years, the iconographic artist has patiently put together a collection of images taken from the collections of some of the greatest Western museums. On her hard drive, away from prying eyes, she has become the curator and guardian of a collection that only she visits, but from which she sometimes lets one item or another escape. However, she has concurrently developed a crucial reflection on the way the gaze is constituted, collections are put together and history self-corrects. She takes on these many inconsistencies playfully, as if they warranted rectification. Whomever has suffered the same compulsive excitement as Clémence Estève has whilst scrolling through digital museum catalogues will have undoubtedly noticed that the photographs featured in them follow a highly standardised protocol: cold, flattening lighting that cancels out any shadow or artifice, and works presented against a dull background. The artist repurposes this apparent neutrality through her practice of drawing. These two aspects of her practice – curatorial collecting and restorative drawing – complete one another when Clémence Estève creates her works, which are generally made up of sets of pieces presented throughout the exhibition space. Her sketches break out of the artwork reproductions, spread out over the white walls as three-dimensional shapes, like as many retinal persistence phenomena. A proudly raised finger breaks free from the shell of a closed fist; a friendly hand drapes over a human shoulder; whimsical feet hold up pictures from another era.

Excerpt from a text by Andy Rankin for the Révélations Emerige 2022