British Outsider Art

Les grandes Collections d’Art Brut britannique
Exposition
Arts plastiques
Halle Saint-Pierre Paris 18
BRITISH OUTSIDER ART, première exposition majeure consacrée à la création hors-normes britannique, ouvre une porte sur l'univers particulier d'individus ayant créé en dehors de tout système artistique officiel ou d'instances culturelles reconnues. Elle trouve un éclairage mérité à la Halle Saint Pierre où les grandes figures internationales de l’art brut et de l’art singulier sont régulièrement célébrées. Un ensemble d’environ 150 dessins, peintures, sculptures provenant de collections publiques anglaises et écossaises, de galeries et de collectionneurs passionnés, témoignent de l’exceptionnelle créativité de leurs auteurs, qu’une étrange nécessité a propulsés dans une fièvre de création où ils s’absorbent tout entiers, sans chercher la gloire ou la reconnaissance du public. Une grande partie des oeuvres présentées dans l’exposition a été réalisée par des malades mentaux. Ces témoignages artistiques fascinants proviennent des archives historiques des hôpitaux psychiatriques et datent, pour certains, du début du XIXe siècle. Le territoire de l’art outsider ne se limitant pas à l’art asilaire, l’exposition donne une place importante aux créateurs qui sont restés éloignés des avant-gardes et des normes esthétiques pour suivre des voies spontanées, originales par leur technique, leur sujet et leur système de figuration. Il s’agit de personnes dont les productions sont le fruit d’une expérience mystique, de solitaires à la logique autarcique longtemps maintenus dans l’ombre, et de ceux qui, bien que plus conscients des codes culturels, restent fidèles à leur monde intérieur. L’histoire de l’art brut en Grande-Bretagne commence, avec le Bethlem Royal Hospital, fondé en 1247 à Londres à Bishopsgate. Surnommée « Bedlam », c’est l’institution la plus ancienne dans le traitement de l’aliénation mentale. En 1735, William Hogarth raconte, en une série de huit gravures, The Rake’s Progress (la Carrière du Roué), les aventures de Tom Rakewell, depuis le moment où il hérite d'un riche marchand avare jusqu'à sa fin à Bedlam, La dernière planche est connue pour être la première description de la folie chez un artiste. En 1900, la première exposition publique européenne, organisée par le Révérend O'Donahue réunit les travaux des malades mentaux de l’hôpital, puis en 1913, se tint une exposition d'art psychotique, à l’occasion d’une conférence internationale de médecine. Au cours de sa longue histoire, Bethlem a occupé plusieurs sites, jusqu’à ce qu’en 1930 il soit définitivement transféré à Beckenham dans le Kent, son emplacement actuel. Aujourd'hui, une collection de près de mille oeuvres est conservée au Musée et dans les Archives de l’hôpital, dues à des patients inconnus ainsi qu’à des artistes célèbres, tous atteints de maladie mentale. Les oeuvres les plus anciennes sélectionnées pour cette exposition ont été réalisées par Jonathan Martin (1782–1838), interné après sa tentative, en partie réussie, de mettre le feu à la cathédrale de York (York Minster). Il ne reste souvent que peu d’informations sur les dessins et peintures conservés dans les Archives de Bethlem, si ce n’est le diagnostic clinique de l'auteur. Ainsi, outre une peinture de Marion Patrick (1940–1993), un croquis de E. Baron, des dessins de Gilbert Price associés à une écriture très individuelle et ceux d’un artiste connu sous le nom de Jackie, nous incluons un nombre de pièces anonymes. Plusieurs de ces dessins, extrêmement puissants, sont à l’évidence l’oeuvre d’un même esprit tourmenté. L’une des premières personnes à avoir étudié l’art des malades mentaux fut le Docteur William A.F. Browne (1805–1885), nommé en 1838 médecin-chef au Crichton Royal Hospital nouvellement construit à Dumfries, en Ecosse. En 1839, quatre-vingts ans avant le Dr Hans Prinzhorn, directeur du service psychiatrique de la clinique de l'Université de Heidelberg, Browne entreprit de constituer l’une des premières collections d’art de malades mentaux. Il réunit un grand ensemble de travaux de patients psychotiques internés et les regroupa en trois volumes. Homme éclairé et tourné vers l’avenir, Browne avait publié deux ans plus tôt What Asylums Were, Are, and Ought To Be ( ce que les asiles étaient, sont et devraient être ). Le livre est une description détaillée de l’ « asile idéal » et de son fonctionnement. Browne chercha à maintenir ses patients occupés, encourageant l’écriture, l’art, le théâtre et à les faire participer à toutes sortes d'activités bien avant que les notions de thérapie occupationnelle et d'art-thérapie aient vu le jour. En 1880, il publia dans le Journal of Psychological Medicine and Mental Pathology un article, « Mad Artists », dans lequel il donne son point de vue sur la maladie mentale et ses effets sur des artistes connus. Andrew Kennedy (1825-1899) est interné au Crichton Royal Hospital quand il se lance, en 1882, dans une activité artistique prolifique. Ses extraordinaires dessins, jamais exposés jusqu’ici, ont probablement été conservés par les médecins pour illustrer leurs cours sur la maladie mentale plutôt que pour leur valeur artistique. La seconde moitié du XIXe siècle a vu l’apogée d’une nouvelle doctrine, le spiritisme et, avec lui, un engouement pour les questions paranormales. Des personnes se mettent à produire des dessins spirites; parmi elles Madge Gill (1882-1961), figure emblématique de l’art médiumnique, commence en 1919 à réaliser des broderies, à dessiner, tricoter et écrire guidée par une force invisible, sans pouvoir définir sa nature. La première exposition personnelle de Scottie Wilson (1888–1972) se tint en 1945 à l’Arcade Gallery de Londres, parallèlement à l’exposition collective Surrealist Diversity 1915–1945, qui comprenait des personnalités comme Arp, Brauner, Chirico, Ernst, Giacometti, Klee, Magritte, Miró, Picasso, Man Ray. L’oeuvre de Scottie Wilson suscita l’admiration de Dubuffet et Picasso. Madge Gill et Scottie Wilson figurent tous deux dans le livre de Roger Cardinal Outsider Art, publié en 1972. Ce premier ouvrage général sur l’art brut, introduisant les théories de Jean Dubuffet auprès du public anglophone, réunit à la fois les premières collections asilaires, la collection de Dubuffet et les grands environnements visionnaires tels que le Palais Idéal du Facteur Cheval ou les Tours de Watts de Simon Rodia. Le terme Outsider Art devint ainsi l’équivalent anglo-saxon d’« Art Brut ». En 1979, s’ouvre à Londres, à la Hayward Gallery, l’exposition Outsiders, première manifestation historique et internationale regroupant autour de l’art brut, de la collection Prinzhorn à celle de Bourbonnais, une douzaine de classiques reconnus, autant de « singuliers » venus de France, sept artistes de Gugging, un hôpital psychiatrique autrichien, et trois cas d’art brut américain incontestables : Darger, Yoakum et Ramirez. L’exposition, organisée pour le Arts Council par Roger Cardinal et Victor Musgrave, poète surréaliste, cinéaste et galeriste précurseur, reçut un accueil mitigé. Plusieurs critiques et historiens d'art furent prompts à prendre leur distance avec ce nouvel art, remettant en cause l'acceptabilité de l’Art Outsider, perçu peut-être comme une menace pour les institutions officielles. En 1981, Musgrave, fonde The Outsider Archive, un organisme consacré à la collection et la connaissance de l’Art Outsider. S’appuyant sur un réseau de découvreurs et avec le soutien de personnes engagées et passionnées, Musgrave accompagné plus tard de Monika Kinley, constitue une collection d’oeuvres significatives du monde entier. Le couple prospecte près de chez eux et découvre notamment Perifimou, gardien à la Tate Gallery, Albert Louden, chauffeur-livreur et Farouq Molloy standardiste dans un hôpital local. Lorsque le projet d’installer leur collection dans un espace permanent échoue, ils choisissent de la mettre en dépôt au Musée d’art moderne de Dublin. En Ecosse, c’est la pionnière en art-thérapie, Joyce Laing, qui la première constitua, dans les années soixante-dix, une collection d’Art Outsider, utilisant le terme d’Art Extraordinary. Actuellement directrice de l’Art Extraordinary Trust, sur la côte est de l'Ecosse, elle s’est intéressée aux formes de création spontanée et inventive, comme les sculptures en pierre d'Adam Christie (1868-1950) et une collection de dessins anonymes, trouvés dans un vieil entrepôt du Royal Cornhill Hospital à Aberdeen, attribués à un patient de l’époque victorienne. Dans la collection qu’elle a montée, bien que certaines pièces proviennent d’établissements psychiatriques, Laing décida de ne pas intégrer les oeuvres réalisées au cours de séances d’art-thérapie. L'art brut, en effet, ne peut être confondu avec l’art-thérapie dont la méthode thérapeutique freinerait la spontanéité et l’expressivité. Artiste professionnel, Edouard Adamson, ouvrit son atelier en 1946, à l’hôpital psychiatrique de Netherne dans le Surrey et participa à la mise en place du premier cours d’art-thérapie en Angleterre. Parmi les quelques 40 000 dessins, peintures et autres oeuvres qu’il rassembla, peu peuvent prétendre relever de l’art brut. William Kurelek (1927-1777), fut un des patients d'Adamson. Artiste canadien d'origine ukrainienne, il arriva en Angleterre en 1952 dans l’espoir de trouver un meilleur traitement pour la schizophrénie. L’évolution dans les approches cliniques de la maladie mentale, et notamment l'introduction des médicaments antipsychotiques et modificateurs de l’humeur ont, pour beaucoup de psychotiques, affecté leur création. Ils sont peu nombreux ceux dont le besoin de créer est si intense qu’ils rejettent les traitements. C’est la cas de Nick Blinko (né en 1961) qui choisit d’abandonner toute protection de sa santé mentale pour faire de l’art car, si les médicaments lui apportent la stabilité psychique, ils le privent de sa capacité à créer ses dessins obsessionnels d’une précision microscopique. En 1989, une publication fondée à Londres par John Maizels, Raw Vision, va donner une audience internationale à l’art brut européen et rapprocher un continent jusque là éloigné : l’Amérique. Le champ de prospection de la revue est large et donne une place importante à la reconnaissance d’artistes autodidactes comme Vonn Ströpp (né en 1962), dont l’oeuvre techniquement maîtrisée possède cependant des qualité visionnaires remarquables, Richard Nie (né en 1954) qui a commencé à dessiner sur ses notations musicales, Ben Wilson (né en 1963), connu pour ses assemblages en bois, qui peint maintenant de magnifiques miniatures sur les chewing gums usagés des rues de Londres En 2006, l’exposition Inner Worlds Outside présentée à la Caixa à Madrid, à la Whitechapel à Londres puis à l’Irish Museum of Modern Art à Dublin, fut organisée par Jon Thompson dans l’intention d’affirmer la valeur de l’Art Outsider et de dévoiler des passerelles avec la tradition de l’art moderne tout en démontrant l’influence que certains artistes d’art brut méconnus ont eu sur quelques grands noms de l'art du XXe siècle. Ce parti pris a dérangé plusieurs membres de l’establishment artistique et la réaction de plusieurs critiques d'art a clairement démontré que, en ce qui concerne la culture dominante, peu de choses avait évolué depuis l’exposition Outsiders, vingt-sept ans plus tôt à la Hayward Gallery. De nombreuses expositions, plus petites, ont eu lieu ces dix dernières années, mais l’Art outsider souffre toujours d’être sous représenté en Grande Bretagne. Les oeuvres présentées à la Halle Saint Pierre, ne témoignent que d’une partie de la richesse et de la complexité de l’Art Outsider britannique. Elles honorent l’héritage artistique laissé par ceux qui sont devenus de grands classiques, dans le même temps qu’elles célèbrent les créateurs actuels qui suivent les traces de cette révolution artistique. Cet Art Outsider dont chaque auteur a su développer son propre langage, créer son propre univers, ne se réfère à aucun modèle artistique, mais a le pouvoir de pénétrer lentement la conscience et les oeuvres des artistes du « mainstream ». La reconnaissance qui lui est due nécessite désormais qu en Grande Bretagne, un musée destiné à sa présentation permanente lui soit consacré. Julia Elmore Commissaires de l’exposition : Martine Lusardy, Directrice de la Halle Saint Pierre, Julia Elmore Communication : Olga Caldas • Tel. +33 (0)1 42 58 72 89 communication@hallesaintpierre.org

Complément d'information

British Outsider Art

Catalogue.

Ateliers Jeune public : visites animées et ateliers de création
Renseignements : 01 42 58 72 89
animation@hallesaintpierre.org

Autres artistes présentés

Les grandes Collections d’Art Brut britannique (Jonathan Martin, Andrew Kennedy, Madge Gill, Scottie Wilson, Adam Christie, Nick Blinko, parmi d'autres).

Horaires

Tous les Jours de 10h à 18h (7/7jours)

Accès mobilité réduite

Oui

Adresse

Halle Saint-Pierre 2 rue Ronsard 75018 Paris 18 France

Comment s'y rendre

  • ADRESSE
    Halle Saint Pierre

    2, rue Ronsard – 75018 Paris
    Tél. : 33 (0) 1 42 58 72 89
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  • ACCÈS : Métros Anvers, Abbesses
Dernière mise à jour le 13 octobre 2022