Botto e Bruno // Sleeping Town

Un collage de papier-affiche de grand tirage s’étend sur les murs du Hall de l’Ecole recréant un espace urbain
de banlieue, une superstructure architecturale sans identité. Des images prises dans les périphéries lyonnaises,
parisiennes, turinoises et barcelonaises se mêlent pour former un ensemble de construction imperméable et
désocialisé.
Dans ce projet du Hall les artistes italiens Botto et Bruno se font les témoins d’un réel, de ces lieux de plus en plus
dévitalisés jusqu’à devenir des no man’s land qui nient l’existence de l’homme dans cet environnement écrasant.
Ici, les deux artistes franchissent une autre étape, bien que l’espoir d’une vie dans les banlieues ait toujours été
présent dans leurs travaux, « sleeping town » prend une tournure plus incertaine. L’imposante composition se
désagrège dans le blanc du mur et donne une impression apocalyptique. La banlieue est en ruine; les couleurs
s’assombrissent; l’être n’apparaît plus que dans la trace du tag. Le site est une superposition graphiquement
cohérente, frontale, appréhendé dans sa pure fonction : l’école, la fabrique, le chantier, la résidence. Elle devient une
sculpture de béton quasi impraticable ou le naturel est révoqué, l’histoire effacée.
Au temps de la globalisation voici le retour de la cité dortoir avec des ambitions bien moins louables que celles des
années 60.
Botto et Bruno expérimentent les périphéries. Ils y vivent et souhaitent partager un sentiment, une sensation
d’abandon.
Jouant avec l’espace, les escaliers qui se répètent, la transparence des portes battantes, la loge d’accueil et son store
à moitié baissé, ils invitent le spectateur à expérimenter l’espace, à se réapproprier la ville contemporaine. Le visiteur
de passage dans ce lieu de transit devient l’acteur, un passant, un voyageur du quotidien en tension permanente
entre le coeur de la ville et son activité et la périphérie.
Dans le rituel du déplacement, le photomontage se fait oublier. Le collage manuel se fait plus apparent. Le travail des
artistes se donne à voir et modifie le projet. « Sleeping town » reste une fabrication, un lieu sans existence. «Le plus
dur, c’est la chute» mais le travail de Botto et Bruno ne se fait pas l’annonce amère d’une fin irrévocable: la banlieue
endormie attend calmement son réveil.