Azurasein

Nicolas Moulin
Exposition
Arts plastiques
Villa du Parc Centre d'art contemporain Annemasse

La Villa du Parc présente un ensemble de pièces nouvelles (textes, photographies, installations, bande-son)  de Nicolas Moulin autour d'Azurazia, fiction en cours d'une cité méditerranéenne uchronique.

"Les hélicoptères tripales Antonov et leur bruit significatif de mitrailleuse en sourdine troublèrent le silence vitrifié de la canicule et surprirent Ghazi Van Keering dans son sommeil à 12h24PM, heure universelle, alors que le soleil s'affairait à taper à coups de marteau sur les montagnes du Sinaï. Un premier engin atterrit bruyamment à proximité de l'immense édifice inachevé, soulevant un nuage de poussière qui enveloppa subitement toute sa base, avant de s’engouffrer à l’intérieur et de remonter à travers les cages d’ascenseur vides, aspiré par un appel d'air. Dans l'atmosphère crasseuse et suffocante, Ghazi Van Keering entendit un second engin en vol stationnaire juste au-dessus du bâtiment en forme de tripode pyramidal, semblant hésiter avant de se poser lourdement sur le toit. L'impact fit vibrer la structure de l'immense tour oubliée et danser les longues tiges de fer rouillées dépassant de la dalle du restaurant panoramique du sommet, où Ghazi Van Keering avait élu domicile. Il s'efforça de se lever, les jambes ankylosées par des semaines de position allongée, et saisit sa paire de jumelles qu'il gardait toujours à portée de main, généralement pour observer les silhouettes des fantômes qui peuplaient les fata morgana du désert environnant. Il parvint péniblement à rejoindre le balcon qui cernait l'immense salle circulaire et se pencha au parapet, et aperçut à travers la crasse en lévitation, trois cent trente mètres plus bas, cinq silhouettes se dirigeant au pas de course vers l'entrée sud de la tour. Elles portaient l'uniforme de la guilde des transports d’Azurazia : un qamis bleu nuit aux manches longues s'arrêtant à mi-mollet, laissant dépasser un pantalon gris d'une étoffe légère et d'épaisses chaussures noires à semelles crantées, ainsi que des coupe-vent avec inscrit au dos en arabe : Azuratrans. Cette fois-ci, il n’était pas question de mirages, ni de fantômes. On venait le chercher. En grandes pompes. Pour le ramener dans le monde des vivants. Il s’affaira à rassembler dans un sac en plastique le peu d'affaires qui l'accompagnaient ici : un tapis de prière, un duvet à motifs floraux crasseux, sa plaque intercom débranchée depuis 7 ans, une bouteille en plastique Azuraqua à moitié pleine d'une eau beigeasse, un exemplaire du Coran, un exemplaire corné du I-King et trois pièces de 20 000 euros qu'il gardait précieusement de son grand-père, et avec lesquelles il tirait quotidiennement les hexagrammes du livre des transformations. Il laissa derrière lui le reste des vivres que lui apportaient chaque semaine les paysans de Dahab, ainsi que les braises encore rougeoyantes du feu de la nuit précédente. Il enfila son qamis réglementaire, qu'il avait conservé soigneusement emballé, ralluma sa plaque qui se reconnecta immédiatement à dix-sept milliards d'autres plaques, puis se posta au centre de l'espace pour recevoir ses visiteurs".
Nicolas Moulin, extrait d'Azurazia

Nicolas Moulin est un artiste français né en 1970 à Paris. Il vit et travaille à Berlin.Le travail de Nicolas Moulin mêle photographie, vidéo, musique et installations dans un univers de science-fiction et d’uchronie. Il invente des circulations dans des paysages difficiles à situer dans le temps et l’espace où ne subsistent souvent que les ruines de la modernité architecturale du XXe siècle. L’exposition Azurasein se focalise sur une fausse rétrospective d’un prototype d’une cité à venir. Nicolas Moulin la réalise à l’aide de plans, d’images et de sons, comme si elle avait effectivement été fondée dans les années 1960 d’un passé uchronique.Son travail a été montré dans de nombreuses institutions en France (Musée d’art moderne de la Ville de Paris en 2005, FRAC PACA en 2006, Villa Arson en 2010, Centre Pompidou-Metz en 2011, FRAC Centre en 2015) et en Europe et en Asie (Biennale de Busan en 2006, NMOCA à Séoul en 2011, Kunstraum Kreuzberg/Bethanien à Berlin en 2013) et il a été nominé au prix Marcel Duchamp en 2009. Il est représenté par la galerie Chez Valentin à Paris.

 

Tarifs :

Entrée libre et gratuite

Commissaires d'exposition

Artistes

Horaires

Mardi-samedi 14h-18h30

Accès mobilité réduite

Oui

Adresse

Villa du Parc Centre d'art contemporain Parc Montessuit 12 rue de Genève 74100 Annemasse France

Comment s'y rendre

Accès terminus tram 17 depuis Genève

Dernière mise à jour le 13 octobre 2022