Athletic Valentin, exposition collective curatée par Andrea Baccin et Ilaria Marotta

Exposition
Chez Valentin Paris 03

Installations, sculptures, ready-mades, figures anthropomorphiques, graphiques, machines inutilisables, bandes son et vidéos sont la production des neuf artistes internationaux - Ei Arakawa, Annabelle Arlie, Gabriele De Santis, Mike Goldby, Anthea Hamilton, Jack Lavander, Daniel Keller, Billy Rennekamp et Federico Pepe –,les sujets de la reconversion de l'espace d'exposition de la galerie en la salle de sport « Athletic Valentin ». Cette exposition de groupe organisée par les directeurs de CURA, Ilaria Marotta et Andrea Baccin, s'inscrit dans la longue et influente tradition des œuvres d'artistes et des projets de commissariat visant à détourner l'espace d'exposition pour le transformer en un lieu à la destination différente.

Des récentes expositions aux Frieze Pavilions à New York, qui ont vu la reconstitution de lieux d'artistes historiques comme FOOD, restaurant fondé par Gordon Matta-Clark en 1971, à l'hommage au Al's Grand Hotel qui a vu la reconstruction du hall d'origine de l'hôtel rejouant le projet légendaire conçu par Allen Ruppersberg en 1971 à Los Angeles, ou encore au Secret Bar de l'américaine Lyzz Glynn, auquel le public pouvait simplement accéder pendant la foire au moyen d'une clef secrètement transmise comme dans une chasse au trésor. Au-delà de la mémoire, la transformation d'un espace d'exposition date des premières tentatives d'artistes de ne plus faire du visiteur un simple élément passif de la réalisation, mais un acteur effectif de l'accomplissement du projet. Dans son iconique essai Inside the White Cube, Brian O'Doherty, identifiantle passage de la peinture au collage comme la transition à l'espace bidimensionnel, c'est-à-dire entre représentation et vie réelle, écrit à ce propos : “with the tableau, the gallery impersonates other spaces, becomes a bar (Kienholz), a hospital room (Kienholz), a bedroom (Oldenburg), a living room (Segal), a “real” studio (Samaras).”.

Dans Athletic Valentin, les neuf artistes présents sont amenés à détruire, reconstruire, annuler la dimension originel de l'espace et activer sa conversion en un autre espace.le projet développé, tout au long de sa vie, par Gregor Schneider, (“a wall in front of a wall, a window in front of a window”), mais aussi de nombreux autres projets destinés à transformer des endroits habituellement ouverts au public en œuvres d'art, des sculptures-bars de Tobias Rehberger à la Biennale de Venise en 2009 – réalisées d'après l'Hôtel Americano à New York - à bien d'autres qu'il serait trop long d'énumérer maintenant. Ici, nous sommes en face, ou plutôt dans un lieu, où le sens originel du mot gym selon le concept classique de salle de gym, est perdu au profit d'un lieu homologué, aseptisé, anonyme, uniquement destiné aux soins du corps appliqués depuis les normes bien connues de la beauté, de la santé et du mode de vie imposées par les médias et la publicité d'aujourd'hui.

Le processus de transformation qui, jusqu'à présent, a souvent conduit le spectateur à s'immerger dans un autre espace – pas une exposition simplement, mais également un environnement - tend paradoxalement dans ce contexte à redevenir exposition. Le mouvement circulaire qui nous y a amené, a franchit une étape supplémentaire. « Exposition », compris dans son sens le plus courant, comme un espace intermédiaire entre réel et virtuel ou réel et fiction, zone fantôme normalement absorbée par le filtre d'un écran, ne semble pas réelle mais presque. Le processus de transformation arrive ainsi à une nouvelle étape de son développement, participant de la création d'une scène, dans laquelle les éléments présents se rapprochent du monde réel, et, au regard de ceux-ci, trompent le visiteur qui, seulement dans une inspection plus minutieuse, y reconnaît l'imposture. Comme sur un plateau de cinéma, chacun des détails ont été recréés, les scènes sont montées, les personnages sont prêts à entrer en scène, mais on réalise que le décor de fond est en carton pâte. Le tapis n'est pas fixé, les personnages sont des mannequins immobiles. Le modèle avancé, né dans le sillage de précédentes tentatives de transformer un environnement en un autre environnement, nous conduit volontairement dans un troisième monde, plus proche de notre époque, qui fait de la fiction une réalité que l'on veut voir. Un environnement où, au regard d'un « big brother » miroir, un public morbide est prêt à jurer que c'est réel. Ainsi, des modèles stéréotypés refont surface, définis depuis les règles identification-ambiguïté- reconnaissance-éloignement-implication. Un monde plastique où nous sommes spectateurs / acteurs / spectateurs (encore).

Adresse

Chez Valentin 9 rue Saint Gilles 75003 Paris 03 France
Dernière mise à jour le 2 mars 2020