12XU

Exposition
Arts plastiques
Galerie Allen Paris 03

Boris Achour
12XU, 2016,
acrylic paint on paper on aluminum,
32 x 32 cm,
Photo: Aurélien Mole

Idiotsaintkrazy.

12XU. Le titre de la première exposition personnelle de Boris Achour à la galerie Allen résonne comme un rébus. Une suite de chiffres et de lettres hurlés au début d’une chanson punk donne à entendre l’énergie adolescente, sa violence et sa puissance désirante. Dans le travail de Boris Achour, souvenirs personnels et mémoire collective se superposent. Des « objets-fictions » composent un puzzle dont les morceaux ne peuvent a priori s’accorder. Chacun est à la fois une énigme et un message. Mais si la règle du jeu a disparu, il est alors possible d’en réinventer plusieurs. Opérer de nouvelles rencontres entre les mots et les formes à travers des systèmes combinatoires subjectifs. Icône, indice, symbole, Boris Achour aime brouiller les signes. En cultivant les doubles jeux, il évite la vacuité d’une unique vérité et l’autoritarisme annihilant pour y substituer le trouble fictionnel du syncrétisme. Une stratégie poétique de camouflage qui demande de prendre le temps du décryptage ou peut-être simplement d’accepter le côté absurde de ces présences fragmentées.

Tranquillement assis sans rien faire. Les pattes d’un cool Krazy Kat « cartoonesque » en carton-pâte sont croisées. Cela semble d’abord une attitude de passivité, une préférence pour l’inertie à l’action. S’asseoir et ne rien faire. Robert Filiou dirait que c’est un poème d’action. Une action poétique. Une poésie en actes. Les œuvres de Boris Achour évoquent différentes relations au temps et invitent à un renversement de ce qui semblait établi, fixe et figé. Le « non » devient « oui » et cette inversion positive rappelle le concept spinoziste de Conatus, affirmation du désir, motif et leitmotiv de l’œuvre de l’artiste depuis ses débuts1 . What Part Of Yes Don’t You Understand? Bruce Nauman parlait d’« un art qui agirait comme un coup de batte de base-ball en pleine face2 », Boris Achour quant à lui nous propose les deux en même temps. L’art et le désir forment une même entité qui produit de l’action, des mises en mouvement et de nouvelles relations.

News From Friends. Avec humour et nostalgie, Boris Achour convie les fictions des autres. Dans la solitude de l’atelier, des artistes admirés deviennent des amis imaginaires et imagés. Fan de. Si l’artiste et son œuvre se confondent souvent, Boris Achour échappe aux définitions en procédant par figures de substitution. À coups de métonymie, synecdoque et périphrase, il produit des combinaisons manquantes. Il est nulle part et partout à la fois. Il est le scénariste, le metteur en scène et tous les personnages, mais s’arrange pour qu’on ne le voie pas. Au fil de ses « expositions-épisodes » un portrait en creux se dessine pourtant. La fin reste ouverte, le cliffhanger ne trouvera pas de résolution dans le prochain épisode ni dans les suivants. Car l’éclectisme fictionnel de Boris Achour réaffirme sans cesse la pluralité des désirs, dont les incohérences construisent des rencontres et nous font devenir sujets. « Une fiction permet de saisir la réalité et en même temps ce qu’elle cache3 ».

Marie Bechetoille

Artistes

Adresse

Galerie Allen 6, passage Sainte-Avoye 75003 Paris 03 France
Dernière mise à jour le 13 octobre 2022