left on read ✓, exposition de Louise Sartor

Projet soutenu par le Cnap
Exposition
Arts plastiques
Crèvecoeur Paris 20

C’est sur des rouleaux de papier toilette dépliés, sur des fragments d’emballage, sur des objets destinés à être jetés, que Louise Sartor exécute ses peintures. Il y a ici quelque chose de très familier qui nous rappelle un Polaroïd, une carte postale, ou même une image pieuse, qu’on aurait maintes fois manipulée. Les sujets sont petits, et on ne sait pas qui, du sujet ou du support, le premier en détermine le format. De jeunes femmes citadines, habillés avec grand soin, prises sur le vif, avec les accessoires indispensables à leur survie : téléphones portables, sacs certainement griffés. Des filles peut-être célèbres, sûrement plutôt riches, qu’on admire intensément, ou qu’on méprise, un peu. Des images de magazines, de réseaux sociaux, de blogs. Instagram comme le nouveau sujet de la peinture. Si l’iconographie en usage dans une société donnée conditionne notre façon de voir, alors il faut s’attendre à ce que ce type de photos, vrais-faux selfies, devienne un genre. Détermine a posteriori notre époque. Soit analysé au futur comme indices d’une histoire culturelle.

Pourtant ce n’est pas le sujet principal de la peinture de Louise Sartor. Ce qu’elle saisit, au-delà des postures chorégraphiées et des allures sophistiquées, ce sont des moments de latence. Entre deux coups de fil, à l’attente d’un taxi, ou tandis que la conversation fait une pause. Des moments silencieux, finalement assez intimes, qui rappellent les portraits des peintures anciennes. À ceci près qu’on est, époque oblige, hors de la sphère domestique - là où les femmes étaient si longtemps confinées. On est dans la rue, et on est même, quasi-simultanément, sur les téléphones de tout le monde. Louise Sartor peint des femmes, ses contemporaines, qui, en regard de l’histoire des femmes représentées dans la peinture jusqu’à présent, semblent ne jamais avoir été aussi libres. Ce qu’elle saisit néanmoins, ce qui rend ses œuvres si familières, si intemporelles, si intimes, c’est que le prix à payer de cette liberté infinie, c’est peut-être la solitude. Celle qu’on ressent quand le dernier message envoyé reste «left on read», marqué lu, juste lu. Sans réponse.

Avec le soutien aux galeries / première exposition du Centre national des arts plastiques.

Artistes

Adresse

Crèvecoeur 9 rue des Cascades 75020 Paris 20 France
Dernière mise à jour le 17 juin 2021